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3 octobre 2017

De la culture, des machines et des hommes

Vivre plus longtemps grâce à la culture. Telle est la conclusion de recherches menées aux États-Unis, dont les résultats prouveraient l’impact positif des activités culturelles sur la santé. Mais encore faut-il que les personnes âgées puissent avoir les moyens de faire fonctionner leurs neurones…

« Ce n’est pas parce qu’on vieillit qu’on arrête de jouer, c’est parce qu’on arrête de jouer qu’on vieillit ». Cette phrase de Georges Bernard Shaw, prix Nobel de littérature, résume assez bien le rapport qu’entretiennent les personnes âgées avec les loisirs ou la culture. D’après une enquête de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (Unccas) publiée en octobre 2015[1], les activités culturelles sont plébiscitées par nos aînés. En effet, trois quarts des sondés déclarent en pratiquer au moins une régulièrement… tant que cela reste possible. Car l’étude précitée souligne la diminution de la participation avec l’âge, généralement du fait d’offres jugées inadaptées à la perte d’autonomie. Regrettable lorsqu’on sait que la pratique de ces activités constitue un moyen de se prémunir contre la dégradation des fonctions cognitives. Il n’y a pourtant pas d’âge pour activer ses méninges ! Cela, des startups l’ont bien compris en développant des dispositifs qui permettent de conserver une certaine vitalité intellectuelle, tout en restant en prise avec le monde réel.

Visite guidée sur canapé

Importer la culture à domicile. C’est la promesse faite par RoboCARE Lab aux bénéficiaires de leur offre Présence+ Museum, plateforme numérique de service offrant la possibilité de visiter des centres culturels à distance. De l’innovation au patrimoine, il n’y a désormais qu’un pas ! Et c’est SAM qui assure la jonction entre les deux. Produit phare de la startup, SAM est un robot de téléprésence mobile, permettant d’échanger avec les proches par le principe de visioconférence. Désormais relié à Présence+ Museum, il acquiert une dimension culturelle.
À l’occasion de son exposition « Art Déco », centrée autour du cinéma et du music-hall des années 1920, la ville de Saint-Quentin (Aisne) a conclu un partenariat avec RoboCARE Lab. Ce dernier consiste en une location de robots par le musée, qui gère les rendez-vous. La Direction du patrimoine de la mairie valide les créneaux préalablement réservés par les intéressés et met à disposition du « visiteur » un guide pour l’accompagner. Sécurité oblige.
Faïssal Houhou, co-fondateur de la startup, rassure quant au pilotage du robot : « SAM est très maniable et offre une vision globale juste en utilisant les flèches du clavier de l’ordinateur ». Il ne s’agit donc pas ici d’un dispositif du type Google Street View se contentant d’un balayage latéral : « les visites virtuelles sur Google ont un côté non interactif puisque vous êtes seul devant votre écran. Là, vous communiquez avec le public et avez la sensation d’être véritablement présent ». Au point de s’imaginer aux Folies Bergères grâce à l’hologramme de Joséphine Baker. Osez (avec) Joséphine.

Technologie et SAP : approches croisées

Entièrement immersive, cette expérience permet à la personne âgée de stimuler ses fonctions visuo-spatiales sans effort physique. Toutefois, la durée d’une exposition, limitée dans le temps, ne favorise pas une stimulation régulière. C’est cette régularité que vise HappyNeuron Activ’. Moins « culturelle » que Présence+ Museum mais tout aussi ludique, cette plateforme donne accès à des logiciels proposant des exercices d’entrainement cérébral. Vendue 15 euros par mois aux particuliers, le prix est divisé par trois pour les professionnels. Car HappyNeuron compte sur les services d’aide à domicile pour apporter la réponse la plus adéquate. « C’est un segment auquel nous croyons beaucoup », confirme son co-fondateur Franck Tarpin-Bernard.
La société s’appuie pour cela sur un alliage digital-SAP : « nous proposons des approches mixtes croisant savoir-faire technologique et apport des professionnels de l’aide à domicile. Ces derniers vont pouvoir assurer un suivi régulier et échanger sur le contenu des séances ». Elle travaille d’ailleurs en étroite collaboration avec deux SAAD et forme le personnel de l’une des deux structures à la compréhension de la stimulation cognitive.
Pour autant, difficile d’objectiver des résultats tangibles. Le but est moins ici de répondre à des objectifs chiffrés que de ralentir au maximum le déclin des fonctions cognitives, via des stratégies visant à mieux vivre avec ces déficits. Mais si ces outils sont pour Franck Tarpin-Bernard des leviers compensatoires, l’Homme constitue toujours l’appui le plus précieux : « l’humain apporte heureusement plus de choses que la machine du point de vue de l’explication, de l’encouragement et de l’empathie ». Malgré l’extension du domaine de la technologie, le cerveau et la culture ne sont donc pas en passe de se passer des hommes.

Bastien Terrade

 
[1]1. Enquête « Bien vieillir dans la société », Union Nationale des Centres Communaux et intercommunaux d’Action Sociale, octobre 2015
 


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