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4 mars 2019

Grippe :
l’obligation vaccinale deviendrait-elle réalité ?

La nouvelle épidémie de grippe qui frappe la France ouvre une fois de plus le débat sur la vaccination obligatoire des personnels soignants présents en Ehpad. Cette année, le ministère de la Santé semble avoir pris les devants en lançant une vaste étude sur le sujet. L’obligation vaccinale n’a jamais parue aussi proche.

Comme chaque année, la grippe montre le bout de son nez, avec les dégâts que l’on connaît. Selon l’agence sanitaire Santé publique France. « Environ 1100 décès tous âges confondus sont attribuables à la grippe, depuis le début de la surveillance », note-t-elle dans son bulletin hebdomadaire publié début février. Dans les quelque 10 000 établissements pour personnes âgées, 160 foyers d’infections respiratoires aiguës ont été attribués à l’épidémie et les décès commencent à se multiplier. Comme tous les ans, la grippe pose invariablement la question de l’obligation vaccinale des professionnels de santé, sans pour autant qu’une réponse convaincante soit apportée par le ministère de la Santé. Et pourtant, le dossier est peut-être sur le point d’avancer.

Le 6 février dernier, dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes aborde la gestion des risques infectieux associés aux soins et notamment, celui de la grippe. Selon elle, il ne fait aucun doute que des efforts considérables doivent être accomplis pour augmenter la couverture vaccinale du personnel au sein des établissements médico-sociaux, (qui restent, de façon préoccupante, en deçà des 25 %), en rendant notamment la vaccination des professionnels obligatoire. Le ministère, longtemps frileux sur le sujet semble d’ailleurs avoir pris la mesure du problème, en lançant fin janvier un groupe de travail sur le sujet dans lequel figurent la HAS, Santé publique France, des centres d’appui pour la prévention des infections associées aux soins (Cpias) et plusieurs représentants professionnels, notamment la FFAMCO. Le but : évaluer le taux de vaccination des personnels soignants dans le secteur sanitaire et médico-social, notamment pour ce qui concerne la grippe. Une étude de grande ampleur devrait être lancée dans les prochaines semaines et finalisée cet été.

Une obligation suspendue
A l’heure actuelle, les professionnels qu’ils soient présents à l’hôpital ou en Ehpad ont l’obligation de se vacciner contre certaines pathologies particulièrement dangereuses comme la diphtérie, le tétanos, l’hépatite B ou encore la poliomyélite. Certaines maladies ne font en revanche l’objet que de simples recommandations de la part du ministère de la Santé. C’est le cas de la rougeole, la coqueluche, la varicelle et bien sûr, de la grippe. Pourtant, selon le Code de la santé publique, « l’obligation de vaccination concernant cette pathologie existe bel et bien, mais elle a été suspendue par un décret du 14 octobre 2016 », rappelle Nathalie Maubourguet, présidente de la FFAMCO et investie dans ce groupe de travail.

Après les débats, l’évidence
Quelles sont les enjeux de cette étude pour le ministère ? Cet exercice de grande ampleur permettra sans doute d’en savoir plus sur les pratiques en vigueur et notamment les freins existants chez les professionnels de santé. Sur la base de ces données, il sera ensuite temps de prendre une décision en toute connaissance de cause. En fait, le ministère cherche à savoir quelles seront les inconvénients (levée potentielle de boucliers parmi les professionnels de santé) et les avantages (mieux protéger les malades à l’hôpital et les résidents en Ehpad) d’une telle obligation. Pour Nathalie Maubourguet, comme pour la plupart des médecins coordonnateurs, celle-ci ne fait en tout cas aucun doute. « Il n’est pas normal que les professionnels qui sont censés accompagner les résidents prennent le risque de leur transmettre la grippe par leur refus de la vaccination, alors que des mesures très spécifiques sont précisément organisées dans les Ehpad pour vacciner la quasi-totalité des résidents. En tant que soignants, nous nous devons de montrer l’exemple » Une vision que partage Pascal Meyvaert, médecin coordonnateur en Alsace : « Cette mesure d’obligation, si elle était prise, susciterait sans doute des discussions en amont, mais elle devrait finir par s’imposer, comme l’obligation de vacciner les nourrissons, qui avait conduit à beaucoup de débats en amont, mais qui ne pose plus question depuis sa mise en œuvre en 2018. » Bref, cette fameuse obligation vaccinale, véritable serpent de mer depuis de si nombreuses années, est peut-être sur le point de devenir réalité…

Cet article est paru dans le Journal du Médecin Coordonnateur n°80


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