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26 octobre 2022

La résilience des directeurs d’Ehpad : no limit !

L'edito du Mensuel des Maisons de Retraite N°254 (Octobre 2022)

Vous avez aimé gérer la crise sanitaire coincés entre le marteau de la liberté et l’enclume de la sécurité, entre la colère des familles et le doigt vengeur de la justice ? Vous avez aimé ensuite vous en prendre plein la g… dans tous les médias suite à la publication des Fossoyeurs, et ce, que vous soyez public ou privé, Orpéa ou simple Ehpad géré par un CCAS dans la Creuse ?

Vous croyez, une fois ces deux vagues passées, avoir un petit moment de répit ? Mais non mais non les ami.e.s ! Si vous vouliez bien gagner votre vie et vivre tranquilou au soleil, vous n’aviez qu’à faire comme tout le monde : opter pour une carrière d’influenceur installé à Dubaï pour vanter des produits de beauté sur Instagram. Mais vous avez, bande d’écervelés, choisi plutôt d’embrasser la carrière de directeur ou directrice d’Ehpad ! Du coup, la société y a gagné ce que vous avez perdu en quiétude.

Je pense à cette directrice qui ouvre ce jeudi 20 octobre son « Parisien » et qui découvre la « une » : « Ehpad : le nouveau rapport qui accuse ». Et qu’y trouve-t-on ? Un reportage téléguidé par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes qui donne l’impression que tous les Ehpad sont des fraudeurs. Le titre de l’article ? « Arnaques et petites combines des Ehpad privés » : de quoi redonner confiance aux 2 millions de français qui confient un proche à un établissement spécialisé… Mais après si « arnaques » il y a, il faut les dénoncer. On regarde donc les chiffres pour vérifier ce que le journal lui-même qualifie de « bilan glaçant ». Et on se rend compte que sur plus d’un millier de contrôles, dix-sept PV ont été dressés. Oui, vous avez bien lu : 17 PV sur 1000 contrôles. Et tout ça fait deux pages et la « une » du Parisien. Vous voulez pour en avoir le cœur net lire le dit Rapport. Il n’est pas public. En tout et pour tout, vous trouvez sur le site de la DGCCRF un communiqué de presse de deux pages… Même Jean-Christophe Combe a découvert cette étude en lisant le Parisien.

Alors cette même directrice rentre chez elle le soir. Allez un peu de détente. Les pieds sur le canapé, on va faire une petite VOD. Ça tombe bien : ils viennent de sortir la comédie qui, avec plus de deux millions d’entrées, a fait un tabac en début d’année : « Maison de Retraite » avec Kev Adams. Et là, de quoi s’agit-il ? D’un directeur de maison de retraite véreux qui arnaque ses résidents en les spoliant de leurs économies. Décidément… (cf. notre reportage sur les Ehpad au cinéma)

Sinon, les directrices et directeurs d’Ehpad, pris en sandwich en cet automne 2022 entre une crise du recrutement comme jamais le secteur n’en a connu (cf. notre entretien avec Sophie Boissard) et l’explosion de l’inflation (cf. notre dossier du mois), vont devoir élaborer des budgets 2023 dans la position de l’automobiliste conduisant dans une purée de pois. On ne peut pas dire non plus que le Gouvernement regarde en l’air. Un PLFSS 2023 correct, un bouclier énergie reconduit, une Fabrique du Bien Vieillir qui, sans rien régler à court terme, peut raisonnablement servir de caisse de résonance aux diverses revendications… : quand bien même le gouvernement semble n’avoir pas de véritable boussole, au moins pose-t-il quelques rustines là où il faut.

Mais la formidable résilience des directrices et directeurs d’Ehpad continue toutefois d’être mise à rude épreuve. Certains craquent pour aller voguer vers d’autres horizons. Mais vous qui lisez ces pages, celles et ceux qui sont encore là, vous êtes quand même vraiment des as !


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