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4 avril 2020

L’État : à cœur vaillant…

Ils sont en cabinet ministériel, en administration centrale ou dans les ARS : les fonctionnaires de l’Etat sont au cœur de la gestion de crise. Avec un dévouement et une détermination qui méritent d’être salués. Exemples.

Ce sont dans des moments de crise comme celui-là que le mot « régalien » prend tout son sens. Ici, c’est bien l’État qui est en première ligne pour donner le « la », pour fixer la ligne et définir la doctrine, les Conseils Départementaux ou la CNSA étant dans une position plus en retrait.

Du Centre de Crise sanitaire à la cellule de crise de la DGCS

Cœur du réacteur : le Centre de Crise sanitaire du Ministère de la Santé. Piloté par la Direction Générale de la Santé, il fait un point quotidien de la situation avec le concours des autres directions du Ministère dont la Direction Générale de la Cohésion Sociale, spécialement en charge du suivi du secteur médico-social. Au sein de ce Centre de Crise, un Pôle « Organisation des soins » est piloté par Cécile Courrèges, l’ancienne directrice générale de la DGOS qui avait quitté ses fonctions l’été dernier et qui a été rappelée sur le pont pour donner un coup de main.  Ce Centre de Crise est géré évidemment 24h sur 24 à la fois pour élaborer jour après jour la doctrine et les réponses à apporter mais aussi plus opérationnellement pour être en lien permanent avec l’ensemble des Agences Régionales de Santé.

Se tient par ailleurs une réunion quotidienne avec le Ministère de l’Intérieur dans le cadre du centre interministériel de crise situé Place Beauvau.

Mais pour répondre en « circuit court » aux spécificités du secteur médico-social, la ­Direction Générale de la Cohésion Sociale a mis en place dès le 27 février une réunion par semaine dirigée par Virginie Lasserre, la directrice générale de la DGCS, avec toutes les fédérations du secteur des Ehpad et une seconde avec les organisations du champ de l’aide à domicile. C’est là que remontent les problèmes et les alertes du terrain mais c’est là aussi que se construit une partie des solutions ou que se projettent les problèmes des jours à venir. Dès le 10 mars, la DGCS a aussi mis en place une boîte mail toute simple qui a permis en quinze jours de recevoir plus d’un millier de questions. 70% d’entre elles avaient fait l’objet d’une réponse soit via le Ministère, soit via l’ARS compétente.

Le jour où nous avons eu en ligne Cécile Tagliana, la n°2 de la DGCS, les sujets en discussion tournaient autour de trois sujets très concrets : la gestion des corps après le décès, sujet sur lequel une fiche de conduite était en cours d’élaboration ; la question de la fourniture en oxygène dans les Ehpad et le concours pour ce faire des services d’HAD ; ou encore la question des médicaments pour la sédation des malades en fin de vie.

DGCS – Fédérations : une réunion hebdomadaire

Car la DGCS se doit bien aussi de se faire une doctrine sur des sujets brulants. Au moment où dans le Grand Est, les lits de réanimation sont déjà pleinement saturés, quel sort réserver aux personnes âgées atteintes du Covid-19 en Ehpad ? Comment soutenir l’effort des médecins qui sont confrontés à de graves questions éthiques ? Faut-il justement sur ce sujet précis saisir le Conseil Consultatif National d’Ethique ? Ce sont aussi autour des réunions hebdomadaires que les Champvert (AD-PA), Bourquin (FHF) ou Arnaiz-Maumé (Synerpa) remontent les angoisses du terrain : sur les masques, sur les tests, sur l’appel à la réserve sanitaire etc.

La DGCS a également un point audio tous les soirs avec la CNSA qui, si elle est un peu en retrait dans la gestion de la crise sanitaire, joue un rôle notamment dans le secteur du handicap ou dans les relations avec les Conseils Départementaux.

Les ARS mobilisées 24h sur 24

Mais toutes les Agences Régionales de Santé sont également sur le pied de guerre. Dans son bureau de la Porte d’Aubervilliers où elle se déplace tous les jours, Isabelle Bilger, directrice de l’Autonomie de l’ARS Ile-de-France, explique que de nombreux agents de l’ARS sont sur le pied de guerre 7 jours sur 7. Une « guerre » qui a fait son premier mort le 30 mars : Pierre Housieaux, agent au secrétariat général de l’ARS Ile-de-France, volontaire depuis le début de la crise pour animer la cellule téléphonique d’urgence. Mais d’autres agents dans les ARS Grand Est ou Hauts-de-France ont payé un lourd tribut en étant à leur tour infectés.

La vie d’une directrice de l’Autonomie de l’ARS en cette fin mars ? « Des conférences téléphoniques dans tous les sens » décrit Isabelle Bilger. Avec les 8 délégations départementales évidemment. Avec les 8 conseils départementaux. Mais aussi avec les échelons régionaux des fédérations d’Ehpad. Par ailleurs, l’ARS, entièrement réorganisée pour suivre la crise, s’est structurée en « cellules ». Une « cellule Masques » passe ses journées à recueillir les dons de masques, à établir le lien avec les GHT ou encore à organiser la logistique de livraison vers les Ehpad quand ceux-ci en manquent. « Ici, il y a des cartons de masques partout dont nous organisons la livraison nous-même parfois vers les établissements » décrit Isabelle Bilger.

Il y a aussi une cellule « Médicaments » qui gère les questions d’oxygène ou de médicaments de fin de vie. Ou encore une cellule « fin de vie » qui coordonne les services de HAD, mobilise les Réseaux de soins palliatifs, recense la capacité des chambres mortuaires sur la région ou prépare l’éventuelle pénurie à venir de housses mortuaires…

Pour animer ces cellules, des renforts sont venus de partout. Y compris de membres de l’Inspection Générale des Affaires Sociales ou de la Cour des Comptes. On a ainsi retrouvé l’ancienne directrice générale de la CNSA, Geneviève Gueydan, animant une de ces cellules. Ou encore le brillant Hugo Bevor, qui n’est autre que le Directeur des Stratégies Territoriales au Ministère de l’Aménagement du Territoire et qui se retrouve depuis le début de la crise au sein de la délégation départementale Seine-Saint-Denis à Bobigny à devoir piloter les relations entre l’ARS et le Préfet.

Chaque ARS, au-delà de son soutien logistique, a aussi une tâche plus ingrate : recueillir les renseignements au jour le jour. Ce qui signifie concrètement l’envoi quotidien de questionnaires Flash aux Ehpad sommés de recenser le nombre de personnes touchées, le nombre de décès mais aussi les besoins en matériel ou les besoins d’hébergement pour les personnels. « Quand les établissements ne répondent pas plusieurs jours de suite, nous allons vers eux. Pour comprendre leurs difficultés voire pour les aider en les renforçant en personnel administratif » indique la Directrice de l’Autonomie.

Pour ce faire, Aurélien Rousseau, l’ultra-dynamique directeur de l’ARS Ile-de-France a lancé un dispositif baptisé #Renforts-Covid avec le concours de la start-up MedGo qui prend la forme d’une interface digitale qui permet à des étudiants, professionnels actifs ou retraités de venir en renfort des établissements de santé et médicaux-sociaux.

Enfin, au sommet de la pyramide, le Cabinet d’Olivier Véran est évidemment à la manœuvre matin, midi, soir et nuit. Une conseillère technique notamment joue le rôle de tour de contrôle : Laetitia ­Buffet. Cette jeune conseillère à la Cour des Comptes, détachée au Cabinet Buzyn puis Véran, est au quotidien l’interlocutrice réactive des fédérations. Elle est, comme Cécile Tagliana à la DGCS ou Isabelle Bilger à l’ARS Ile-de-France, le symbole de ces hauts-fonctionnaires qui, le service public chevillé au corps, sont dans des moments de crise comme ceux-là, au rendez-vous.


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