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4 avril 2020

Tenez-bon, les ami-e-s !

L'édito du Mensuel des Maisons de Retraite n°229

Chers abonnés, chers lecteurs,

Au moment où ces lignes sont écrites, la France vient de franchir le cap des 4.000 morts, victimes du Covid-19. Enfin … pas tout à fait. Car étonnamment, ces statistiques ne prennent pas en compte les décès intervenus en Ehpad. Impossible donc de savoir précisément pour l’heure à quel point « l’hécatombe » dont on nous parle sera massive ou non.

Ce qui est certain c’est que, face à cette « guerre » contre le Coronavirus, vous résistez !

Vous, à la tête de vos Ehpad, de vos Résidences Autonomie, de vos Saad et Ssiad, vous, médecins coordonnateurs ou IDEC, vous, salariés des établissements, vous êtes une fois de plus à la hauteur de l’enjeu.

Très vite, et avant même que les pouvoirs publics aient eu l’idée de vous y contraindre, vous avez eu le courage d’ordonner le confinement de vos résidents. Pas facile de prendre la responsabilité d’éloigner temporairement les résidents de leurs familles : vous l’avez fait pourtant. Avec autorité. Vous n’avez pas hésité non plus quand il a fallu passer au confinement en chambre à vous organiser en conséquence.

Évidemment, vous n’avez pas tous été égaux face à la propagation du Virus. Nous devons avoir une pensée particulière pour les professionnels du Grand Est, des Hauts de France ou de l’Ile de France qui ont pris la vague en pleine face avec une force et une violence toutes particulières.

Face à cette crise, vous avez alterné entre colère et courage. Colère de ne pas voir le matériel arriver en quantité suffisante et suffisamment rapidement. Ce fut le cas hier pour les masques. Cela l’est encore aujourd’hui pour les tests, l’oxygène, les sur-blouses ou les housses mortuaires. Cette colère, évidemment saine, a été largement entendue par des pouvoirs publics qui, probablement trop lents à réagir, font ce qu’ils peuvent avec les moyens du bord. Et il serait injuste de ne pas faire figurer les agents du Ministère ou des ARS parmi ceux qui méritent les honneurs.

Pourtant au moment où nous publions ce ­Mensuel – 2 avril dans l’après-midi -, le pire n’est ni écrit, ni impossible. Il n’est pas certain parce que vous avez été nombreux à prendre très tôt les mesures nécessaires et qu’on peut penser que la propagation du virus est de ce fait relativement maîtrisée sur le territoire. Il n’est pas non plus impossible parce qu’on voit bien que lorsque le virus entre dans un Ehpad, il peut s’apparenter à une allumette près d’un baril de poudre. Pour l’heure, il faut bien admettre, qu’alors que les Ehpad hébergent 600 000 personnes parmi les plus fragiles de France, ceux comptant un nombre anormalement élevé de morts sont encore relativement peu nombreux. Toujours trop nombreux. Mais pas autant qu’on aurait pu le craindre à ce stade.

L’heure pour le moment est à la mobilisation, au courage et à la ténacité. Viendra ensuite l’heure des interrogations et des remises en cause.

Devra se remettre en cause une société qui tous les jours à 20h00 se met à la fenêtre pour applaudir les soignants mais qui a pourtant fait collectivement le choix de sous-payer les aides-soignantes, les auxiliaires de vie et les ASH depuis des années. Devront se remettre en cause celles et ceux qui ont cru si peu urgent de remettre le système à plat que la loi Grand Âge tant attendue a pu tranquilou être remise de mois en mois sans que ça n’émeuve grand monde. Devront faire leur aggiormento les journalistes qui après avoir voué les Ehpad aux gémonies dans un massif mouvement d’Ehpad bashing découvrent aujourd’hui les vertus de ceux qui y travaillent chaque jour.

On se gardera bien pourtant dans cet Edito d’affirmer avec lyrisme que désormais « plus rien ne sera comme avant ». Peut-être parce nous faisons partie, comme certains d’entre vous, de celles et ceux qui ont vécu en 2003 les 15 000 morts de la canicule et qui se rappellent des conséquences bien pusillanimes qui en avaient alors été tirées. Non, il n’y a aucune évidence que demain sera différent d’hier.

Il n’y a, à ce jour, qu’une seule évidence : c’est sur vous, une fois de plus, que compte la société pour éviter le pire dans les semaines à venir.


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